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Intégration Post-Soviétique : L'Attraction des Autres Ensembles d'Intégration




Face à la politique expansionniste russe et en réaction aux différents coups de force menés par la présidence Poutine, les États-membres de l’UEE ont très tôt décidé de mettre en place des barrières (autant que cela leur fut possible) à l’hégémonie russe.


On peut penser en premier au fait que lors des négociations sur les futurs termes du traité d’Astana, la Biélorussie et le Kazakhstan ont insisté sur la nécessité d’avoir un recours quasi-systématique à l’unanimité. C’est un recours qui a déjà fait ses preuves dans l’Histoire mondiale, on peut notamment penser, en guise d’illustration, au fameux compromis des fédéralistes américains lorsqu’ils consentent à créer un chambre haute (Sénat des Etats-Unis) pour que les droits des plus petits Etats ne soient écrasés par les grands (comme la Virginie aurait pu le faire avec le Rhode Island par exemple). Les Etats faibles demandent souvent le recours à une représentation intergouvernementale ou une unanimité au vote pour se prémunir de la puissance des grands pays. C’est le cas dans l’UEE. Ainsi le recours à l’unanimité oblige l’UEE à ne prendre que des engagements minimums. Si cela empêche une plus forte intégration, à l’image de celle européenne, elle permet néanmoins aux Etats de l’UEE à courber la domination russe dans le processus décisionnel.


Ensuite, le Kazakhstan a fait figure de véritable contrepoids face à la Russie dans sa politique étrangère. Par exemple, c’est le Kazakhstan qui a insisté pour que le mot "Économique" apparaîsse clairement dans l’intitulé de l’organisation internationale (la Russie voulait le nom plus court de “Union Eurasienne”, terme toujours utilisé dans les médias russes d’ailleurs). De même le Kazakhstan a mené de front la résistance face à la Russie sur les questions de citoyenneté de l’Union ou encore de la création d’une monnaie commune (ce qui aurait eu pour résultat l’engloutissement des économies des Etats-membres dans le système financier russe). Le Kazakhstan s'est aussi opposé à l’entrée de l’Arménie dans l’organisation, lui préférant une candidature turque. Même si au final la position russe l’a emportée, le Kazakhstan a montré qu’il y avait une autre puissance aux portes de l’ensemble qui pourrait faire concurrence à la Russie.


Mais le défi le plus fort lancé par le Kazakhstan et la Biélorussie à la Russie, fut leur non reconnaissance des indépendances abkhaze, ossete et criméenne. Ainsi, la Russie s'est retrouvée sans soutiens dans sa politique étrangère. Dans le même temps, le Kazakhstan maintient une politique étrangère multivectorielle vu qu’il courtise tout autant l’UE, les Etats-Unis, la Chine et la Turquie. Au final le Kazakhstan ne se plie à la volonté du Kremlin qu’à cause de la proximité géographique et à cause du poids de la population russe dans le nord du pays (Poutine jouant souvent la menace d’une volonté de rattachement des russes de l’étranger proche pour faire pression sur ses voisins).


L’échec le plus cuisant pour la Russie demeure la non adhésion au projet eurasien de l’Ukraine. En effet, l’Ukraine est non seulement une puissance économique et industrielle non négligeable, elle incarne le véritable pont entre la Russie et l’Europe. Ainsi sans l’Ukraine, le projet eurasien a du mal à décoller. Poutine avait fait pression en 2013 sur l’ancien président Yanoukovitch pour que celui-ci arrête les négociations avec l’UE en vue d’une adhésion à l’UEE. Nous connaissons la suite des événements.


La Russie, ayant mené des opérations agressives contre l'Ukraine, n'a non seulement réussi à perdre toute espérance de rapprochement avec ce pays, elle a aussi envoyé un mauvais signal aux autres Etats-membres de l’UEE. Il est difficile maintenant d’imaginer que l’UEE évolue favorablement pour une intégration au niveau de l’Union avec une méfiance si grande de la part des anciennes Républiques soviétiques au vu du comportement impérialiste de leur grand voisin russe. A titre d’illustration, il suffit de voir que l’Arménie n’a adhéré à l’UEE que sous la pression russe et ne l’aurait peut être pas fait sinon.


La Russie maintient ce rôle ambigu de moteur de l’intégration tout en étant son principal obstacle de part son comportement autoritaire. Si avant il était possible de critiquer un PCUS opposé à l’idée nationale, désormais c’est la Russie nationaliste qui semble vouloir imposer de force une intégration qui profite d’abord à ses intérêts géopolitiques. Ce qui nous amène au dernier axe de réflexion sur l’intégration eurasienne : l’absence d’une “Union de droit”.


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