Tout au long du mois précédent, je me suis penché point par point sur les dangers qui nous attendent en tant que tels. S’ils méritaient tous d’être traités l’un après l’autre en détail, ils ne sont en réalité que des perturbateurs qui ont pour effet de miner le système.
Ce à quoi nous faisons face en ce XXIème siècle c’est surtout un risque d'accumulation des crises. Je vais, dans cet article, illustrer une théorie issue de la “collapsologie” : celle de l’effondrement de système. Cette théorie est le produit d’une étude sociologique, historique, économique et politique qui montre les effets sur la société de deux mouvements connus en physique : la montée croissante de la complexité et la théorie générale de l’entropie.
La montée croissante de la complexité renvoie à un processus évolutionnel évident. Toute chose tend à se complexifier. De l’organisme unicellulaire à l’humain, du code d’Hammourabi au droit moderne, de la tyrannie d’un seul homme à la démocratie.
L’entropie, elle, renvoie au fait que tout chose se décompose. Pour survivre il faut donc avancer. On peut penser au corps humain qui vieillit, mais aussi aux bâtiments qui s’effondrent ou encore aux règles qui n’ont plus de sens du fait de l’évolution de la société.
Ces deux théories combinées nous donnent un constat fondamental : plus on avance, plus tout devient interconnecté et complexe. Et plus on avance, plus le coût de maintien du statu quo augmente, ce qui nous oblige à avancer encore plus.
Cela ne pose pas trop de problèmes quand tout va bien. La technologie progresse, nous offrant des gains de temps et d’argent et nous permettant encore plus de possibilités de complexification, etc … Mais que se passe-t-il quand ce n’est pas le cas ? Que se passe-t-il quand le coût de maintien dépasse ce que l’on peut produire et qu’aucune solution ne s’offre à nous ? Dans le monde des affaires on appelle cela la banqueroute.
Pensez donc, une entreprise fait des profits énormes lors de sa création, et continue à générer des bénéfices jusqu’au moment où elle est dépassée technologiquement et que ses charges dépassent de loin ses revenus ce qui l’oblige à mettre la clef sous la porte.
Nos sociétés fonctionnent de la même façon.
Pour exemple d’effondrement de système je vais prendre l’exemple le plus criant : la fin de l’Empire Romain.
Cet Empire était de loin l’Etat le plus développé de l’Antiquité. Aucun autre ne pouvait l’égaler. Le niveau et la qualité de vie à ce moment-là étaient les plus élevés jamais vus de l’Histoire de l’Humanité. Et pour cause, les citoyens avaient accès, en tout point de l’Empire, à tous les produits et à tous les savoirs des autres provinces. L’Empire était même capable de commercer avec des Etats aussi lointains que la Chine ou l’Inde.
Mais l’Empire avait un coût de maintien énorme : la garde des frontières. Pour maintenir cette civilisation à flot, il était impossible de laisser les provinces sans un niveau suffisant de légions et de fortifications.
Tout allait bien tant que les provinces étaient rentables et que l’Etat rémunérait les légions qui gardaient les provinces. Et puis quelque chose c’est passé : les riches patriciens changèrent la loi pour éviter de payer leurs impôts et ont récupéré à leurs compte tous les avoirs de l’Etat. Très vite l’Etat n’était plus en mesure de maintenir ses légions et a eu recours aux fédérés (les tribus barbares aux frontières) en leur donnant des provinces contre leur allégeance. Mais lorsque la grande migration du Vème siècle a eu lieu, l’Empire ne pouvait plus payer les fédérés, mais en même temps ne pouvait pas non plus abandonner ses provinces sans lesquelles l’Empire ne pouvait exister. Avec des charges immenses et un revenu inexistant l’Empire a tout simplement disparu. Les fédérés revendiquèrent les provinces qui leur furent accordées par l’Empire et devinrent avec le temps nos Etats modernes.
Et bien la même chose peut nous arriver.
Nous vivons dans les sociétés les plus complexes et les plus développées de l’Histoire. Le fonctionnement de notre civilisation dépend d'énormément de facteurs : le commerce international, le progrès technologique, le maintien de la paix, etc … Tout cela a un coût, en impôts, en rentabilité, en ressources …
Tout fonctionne … jusque là.
Mais quand on voit l’impact de la COVID 19 et le coût qu’exige la lutte contre celle-ci, on se demande combien de crises peut-on survivre ?
Si les crises s’enchaînent, si les rouages de notre civilisation sont démontés un à un, si on doit courir d’une alarme à une autre sans jamais en résoudre aucune … Le prix du maintien dépassera nos capacités. Et c’est le système qui s’effondrera.
En d’autres termes, nous pouvons faire face à une, ou même à des crises. Mais si les crises convergent dans une même période et qu’elles ont pour effet de miner le système lui-même, c’est notre civilisation tout entière qui est en danger.
Pour y faire face il faut se préparer, agir et étudier. Il faut savoir où sont les dangers et comment les prévenir. Pour éviter que l’entropie ne nous rattrape, nous devons augmenter notre complexité.
Cela étant dit, il est donc clair que nous sommes face à une crise existentielle et même civilisationnelle. Ce qui veut dire que le véritable champ de bataille sera l’esprit. Les solutions pourront être trouvées, l’Humanité a toujours trouvé en son sein de génies en tout genre.
Ce qu’il faut c’est de la sobriété et une volonté.
C’est pour cela que dans la partie “dangers” de cette chronique, je vais désormais passer du chapitre “dangers physiques ou structurels” au chapitre “dangers idéologiques”. Car au fond notre plus grand danger, c’est nous mêmes, notre apathie, notre individualisme et nos tendances à suivre des charlatans qui utilisent notre besoin de réconfort pour nous assoupir et nous voler.
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